Séance de shibari

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  Un ami apprend le shibari et me propose un jour.
 — Tu veux bien être ma partenaire ? J’aimerais tester le harnais fisherman.
 J’approuve avec enthousiasme, j’aime beaucoup me retrouver dans les cordes ! Des cordes douces, sensuelles, qui m’entourent chaudement, me serrent fort, m’enveloppent comme un cocon… si possible avec un shibariste souriant, aux petits soins, et concentré sur son art. Je sais que ce sera son cas. Mais je ne recherche pas la douleur, je préfère le prévenir ! Ni les poses trop désarticulées, asymétriques, qui peuvent vite se révéler inconfortables, petite nature que je suis…
   Il ne se décourage pas, et le rendez-vous est pris.

  Nous commençons par prendre le thé en bavardant. Je me réchauffe du trajet dans le froid avec ce thé brûlant et l’ambiance chaleureuse des lieux.
  — Tu es prête Clarissa ?
  — D’accord !
  — Tu peux te mettre à l’aise, comme tu préfères.
  J’aime sentir les cordes sur ma peau, je n’hésite pas, ce n’est pas si souvent que je me livre entre les mains d’un shibariste, alors autant vivre l’expérience à fond ! Je ne garde que ma culotte, et je me tiens devant lui, à sa disposition. S’il est surpris, il n’en montre rien. Il prépare ses cordes méticuleusement, les démêle, et j’aime regarder ses gestes sûrs, précis. La séance a commencé.
  — Pour ce harnais, j’ai besoin de trois cordes ! Tu vas rester debout, dans une position bien stable.
   Il prend mes mains et les positionne sur ma poitrine. Je pousse un petit cri et frissonne ; ses mains sont glacées. Il rit, et appuie ses mains sur mon ventre, mes flancs, s’amusant de mes bonds de cabri. Il reprend son sérieux, enroule une première corde autour de mes poignets ; me voilà sa prisonnière. Il se concentre, les cordes dansent autour de moi. Il élude mes questions, se contente de sourire de mes commentaires. et évite tout bavardage inutile, centré sur les cordes et son ouvrage.
   Il me sent distraite : je le suis des yeux, bavarde à tort et à travers… Le shibari c’est aussi une pratique méditative, je devrais me plonger dans mes sensations, au risque de passer à côté de l’expérience. Il prend les devants.
   — Je vais te mettre un masque ! Il est très mignon en plus…
   Il l’ajuste bien sur mes yeux pour éviter toute tricherie.
   Je sens que je m’apaise, tous mes autres sens s’aiguisent aussitôt. Je perçois son souffle, son parfum, j’entends ses pas tandis qu’il tourne autour de moi, et aussi les bruits de la corde qui glisse entre ses mains… Je m’abandonne à la légère transe des cordes, ce plaisir de me remettre entre des mains douées qui tissent sur ma peau un corset de chanvre. Je goutte le moment, cette délicieuse sensation d’abandon ; ne rien faire, à part m’offrir. Il n’attend rien de moi, ni paroles, ni initiatives, ni gestes…
   Un instant, ma claustrophobie pointe le bout de son nez dans mes pensées : je suis tellement entravée, entortillée dans les cordes, ce sera long de me délivrer s’il me prend l’envie d’être libérée. Aussitôt je sens l’envie de me défaire des cordes me démanger, menacer de me submerger. C’est comme un dragon qui se réveille, risque de se déchaîner, exiger de retrouver sa liberté de mouvement là tout de suite ! Mais cela ne dure qu’un instant, je chasse vite mes démons et me détends. J’ai tellement confiance dans mon encordeur, et j’aime qu’il s’occupe de moi, sentir ses mains enrouler les cordes autour de mon corps, les poser sur ma peau, les enfoncer juste ce qu’il faut, ses doigts s’affairer pour composer des nœuds… j’aime lui faire aveuglément confiance – c’est le cas de le dire -, un sentiment chaud, doux, rare.
   — J’ai presque terminé ! Voilà, c’est le dernier nœud.
   Je rêve un instant qu’il poursuive son œuvre, m’emmaillote, m’immobilise totalement, m’encordant les jambes, le ventre, le visage…
   Il me laisse profiter un moment, pendant qu’il prend des photos, m’affublant d’un couvre-chef kawai. Si concentré et sérieux l’instant d’avant, je le retrouve, taquin et joueur !

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