Lettre à mon amant trop sage

201702903_2_IMG_FIX_700x700
    Seconde lettre écrite dans le cadre du concours de textes organisé par Chuchote-moi :

***
    Mon amant,
    Un jour, tu m’as demandé si j’avais un fantasme. J’en ai tellement, si tu savais ! Ils me hantent, ils m’obsèdent… Je préfère t’écrire une lettre pour prendre le temps de les explorer.
    Dans le premier qui me vient à l’esprit, tu m’attends dans une chambre d’hôtel. Tu m’envoies le numéro de la chambre par texto et tu t’allonges sur le lit. Tu es déjà nu ou encore habillé, je n’arrive pas à choisir ! J’aimerais bien découvrir ta peau directement, mais j’aime aussi te déshabiller peu à peu, bouton de chemise après bouton de chemise… Tu as fermé les volets, les rideaux, la chambre est plongée dans la nuit. Tu poses ton enceinte sur la table, une musique romantique emplit la pièce.
    J’arrive quelques minutes plus tard, je tâtonne pour me laver les mains, peut-être laisseras-tu la lumière ouverte dans la salle de bain – pardon pour ces détails pratiques « tue-l’amour » ! Je te rejoins sur le lit, nue ou habillée, je ne sais pas non plus, tu peux choisir…
    Tu gardes les yeux fermés, tu ne dis rien, pas un mot. Tu te laisses embrasser, torturer de caresses en silence. Tu peux rire si je te chatouille, protester de quelques grognements, mais c’est tout ! Quelques paroles m’échapperont sûrement, ton prénom comme un leitmotiv, des mots doux… Ce que je te dirai ne comptera pas, je ne veux aucune réponse, il ne faudra surtout pas me faire la conversation !
    Tu me laisseras te caresser partout longtemps, et puis tu commenceras à me caresser aussi, tu me prendras dans tes bras, à tâtons, sans que je ne cesse de t’embrasser. On se caressera longuement, toujours sans rien dire. Le premier qui s’ennuie ou qui a soif de contacts brisera le silence !
    Je rêve du scénario inverse aussi : c’est moi qui t’attends dans une chambre d’hôtel, les yeux bandés, dans le noir complet. Tu arrives à pas de loup, sans parler, j’ai un peu peur, mais je reconnais vite ton odeur, ton toucher… Et tu fais tout ce que tu veux de moi, sans rien dire. Je m’efforcerai de me taire, tu n’auras que mes soupirs, mes gémissements.
    Nous ferons l’amour lentement, longtemps, en bougeant à peine, je m’allongerai sur toi de tout mon long, me frotterai doucement contre toi, jusqu’au plaisir.
    J’ai des fantasmes plus vifs aussi, des envies d’étreintes rapides, de rendez-vous volés à nos agendas compliqués.
    Un jour, tu as très envie de me voir, ce n’est pas prévu, mais c’est plus fort que toi. Tu envoies promener toutes tes obligations, tu me fais signe et j’accours, ayant tout annulé moi aussi. Nous avons seulement une heure, ou toute l’après-midi ; nous allons nous réfugier n’importe où, du moment que nous pouvons être collés l’un contre l’autre. Un lieu où je peux t’embrasser en liberté, embrasser tes joues, ton cou, glisser mes mains sous ta chemise… Bientôt, tu réponds à mes avances, tu saisis mes hanches, mes seins, nous perdons la tête, je te dévore de baisers pendant que tu me pénètres doucement. Étourdis, nous reprenons nos esprits, je te renvoie à tes dossiers sans un battement de cil.
     J’ai hâte d’être en juin, qu’il fasse beau à nouveau ! Car pour l’instant, avant d’atteindre ma peau, tu dois te faufiler sous plusieurs épaisseurs de pulls… On flânera dans des jardins romantiques, chauffés par les rayons du soleil, à la recherche de clairières ombragées. Je porterai seulement une robe d’été, de la jolie lingerie, ou rien peut-être, une grande capeline… Nous trouverons un bosquet, une haie, un abri pour nous aimer. Ce sera délicieux de mourir de chaud et de se serrer tout moites l’un contre l’autre ! Nous marcherons aussi au cœur de Paris, appréciant la douceur des nuits d’été. Tu me prendras contre un mur sur les bords de Seine, sous les porches, les ponts, sur les bancs publics ; Paris nous proposera mille cachettes.
    J’ai souvent des fantasmes plus épicés : tu pourrais me prêter à l’un de tes amis, si tu penses que je serais à son goût… Tu regarderais, tu participerais, ou tu ne serais pas présent, à ta guise. Tout ce que je lui ferais, je le ferais pour toi.
    J’aimerais t’offrir une fille aussi un jour, si je crois pouvoir supporter vos ébats. Je pense à une amie en particulier, je l’aime beaucoup, je serai fière de lui montrer mon bel amant. Je la caresserai également, je ne pourrai pas résister, sa peau est si douce.
    Nous pourrions nous plonger dans l’ambiance d’un club libertin, nous perdre dans des étreintes avec des inconnus toute la nuit, pour le plaisir de nous retrouver à l’aube, nous serrer fort dans les bras l’un de l’autre, nous câliner, nous rassurer, faire l’amour en échangeant des paroles tendres.
    J’ai des fantasmes de soumission parfois : je ne m’occupe que de ton plaisir, je ne pense qu’à toi, je suis à toi. Je me mets à tes pieds, pendant que tu travailles. Tu consultes des mails, tu envoies des sms, tu peux même répondre au téléphone – à tes risques et périls –, pendant que je te caresse, que je te suce doucement…
    Et j’ai le fantasme inverse aussi, me laisser caresser, sans gigoter, ni fuir… Je ne sais pas si j’en serais capable, je suis trop nerveuse dès que tu es proche de moi ! Je pourrais tenter de te lire une histoire érotique en même temps, ou t’écrire un mail-fleuve, alors que ta tête s’active entre mes jambes, et que ta langue trouve le chemin de mon plaisir.
     Mais tu n’as plus le temps de me voir, nos rendez-vous s’espacent, tu réponds à mes messages du bout des lèvres. Tu t’es lassé, tu ne veux plus de moi, je reste seule avec mes fantasmes inassouvis et mon cœur brisé.

            Ton amante passionnée

      Photo : Out of Africa

4 commentaires

  1. TAF10 a écrit :

    Quel érotisme distingué et parfumé ! Quel plaisir de lire un si beau rêve !!

    1. Clarissa a écrit :

      Merci beaucoup !

  2. Clarissa a écrit :

    Je lis votre message seulement aujourd’hui ! Quel texte magnifique ! Il m’a donné des frissons des pieds à la tête… merci pour cette découverte !

  3. Tibo a écrit :

    Quel véritable amant ne serait éperdument reconnaissant d’une telle invitation au voyage La lettre me rappelle irrésistiblement un court texte d’Hemingway, que je vous livre ci-dessous.
    L’amante passionnée de votre texte si inspirant est une de ces « truly great women ». All men fear death. It’s a natural fear that consumes us all. We fear death because we feel that we haven’t loved well enough or loved at all, which ultimately are one and the same. However, when you make love with a truly great woman, one that deserves the utmost respect in this world and one that makes you feel truly powerful, that fear of death completely disappears. Because when you are sharing your body and heart with a great woman, the world fades away. You two are the only ones in the entire universe. You conquer what most lesser men have never conquered before, you have conquered a great woman’s heart, the most vulnerable thing she can offer to another. Death no longer lingers in the mind. Fear no longer clouds your heart. Only passion for living, and for loving, become your sole reality. This is no easy task for it takes insurmountable courage. But remember this, for that moment when you are making love with a woman true greatness you will feel immortal.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *