Exercice de style de « dark érotisme », inspiré par la « dark romance » dont le succès ne se dément pas et dont on fait grand cas : accusée de pervertir les jeunes filles ou « mal nécessaire » pour purger les passions, les démons qui nous obsèdent, les pulsions d’autodestruction…
Je crois au pouvoir de l’imaginaire, en écriture comme en lecture ! On en a besoin, pour s’évader, se consoler, vivre par procuration… Je suis contre la censure (on a déjà essayé, ça ne marche pas) sauf pour ce qui est interdit par la loi bien sûr, et pour protéger les trop jeunes. Je préfère la mise en place des trigger warnings : que chacun et chacune sache où il ou elle met les pieds (utilisés à bon escient, sans en abuser, car sinon, ils vont perdre leur pouvoir si on n’y croit plus)
Donc, un petit texte pour public averti avec plein de TW : violences, abus, autodestruction. (+18 ans)
(non relu)
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Il est parti, créant une béance dans son cœur. Elle a du mal à respirer, comme si elle randonnait au sommet de l’Himalaya. Elle lui a brisé le cœur, avec ses piques, ses rires, sa fausse indifférence. Elle l’a repoussé, négligé, lui répondant du bout des lèvres, piétinant sa sensibilité… de toute façon, il serait là pour toujours, jusqu’à la fin du temps.
Mais il est parti et elle ne respire plus, le cœur broyé par des démons invisibles, par des torrents de larmes qu’elle retient farouchement. Il lui manque atrocement, dans ses pensées, son cœur, son sexe, dans chaque cellule de son corps souffrant… Il la comblait d’amour, d’orgasmes à foison, d’attentions de tous les instant — trop d’attentions, elle étouffait. Comme elle aimerait étouffer encore ! Sa disparition soudaine crée un vide atroce. Elle s’enfonce dans une nuit de souffrance, dans un silence assourdissant. Elle voudrait s’arracher la peau, se rouler par terre, se taper la tête contre les murs… tout pour apaiser les souffrances de son cœur qui la torturent jour et nuit.
Il lui faisait l’amour avec tant de dévotion, de lenteur, au ralenti, longtemps. Ils s’envolaient, en transe, hypnotisés, dans un état second. Parfois, folle d’excitation, elle se rebellait contre tant de douceur. Elle finissait par imprimer un rythme plus rapide, excédée d’être maintenue sur un plateau de plaisir infini, et elle le chevauchait comme une folle. Il renversait les rôles, la clouait au sol d’une poigne de fer, la mordait car elle aimait ça, et l’aimait éperdument, jusqu’à ce qu’elle crie grâce, exsangue, qu’il ait joui ou pas, ça lui était égal. Seule sa jouissance à elle comptait, peu importe la sienne. Il ne vivait que pour elle, ne faisait l’amour que pour elle, et elle profitait tranquillement de son esclave sexuel, égoïste et satisfaite, sans réaliser combien elle tenait à lui. Elle le réalise trop tard, car il a disparu. Elle adorait son corps doux et mince, sa peau frémissante, ses soupirs, ses joues à dévorer…Il n’avait pas une seconde de répit, mais tout ce qu’elle lui faisait c’était d’abord pour son plaisir à elle, en particulier sucer son sexe parfait, elle raffolait de son goût, de son odeur, de ses réactions viriles, quand lui restait si patient, si tendre, s’interdisant de réagir. Elle le portait à ébullition et puis se laisser lécher longtemps, enchainant les orgasmes, avant de faire l’amour encore, au ralenti, et jouir à nouveau… Un cercle vicieux délicieux sans fin… Ils allaient souvent en club libertin, pour satisfaire leurs fantasmes. Elle éprouvait son abnégation en attrapant au vol d’autres amants, ayant soif de nouveauté, de connaître d’autres peaux, d’autres sexes. Cela l’excitait d’en baiser d’autres devant lui, et de les renvoyer d’un revers de main pour fusionner ensuite avec lui, le désir fouetté, bien contente de le retrouver lui, mille fois meilleur amant que tous les autres. Car il n’y avait que lui au fond, elle était accro à lui, à sa peau, à son sexe, malgré tous ses efforts pour en baiser d’autres, pour tenter d’apaiser son excitation inextinguible et dans l’espoir de le provoquer, de se libérer de son addiction.
Elle ne veut pas s’abrutir de médicaments, et encore moins consulter un psy obséquieux et faussement concerné. Elle va se soigner comme elle l’entend, et ce ne sera pas avec des paroles de réconfort et de consolation. Elle ne veut pas être consolée, elle est inconsolable ; elle veut oublier, faire taire ses tourments, apaiser ses souffrances, avec d’autres tourments et des souffrances, bien réelles. S’offrir jusqu’à épuisement, jusqu’à ce que son corps crie grâce, les seins meurtris, son sexe blessé, dilaté, sa bouche ankylosée…
Elle veut oublier le souvenir de la douceur de son amant perdu qui brûle son cœur à vif, l’oublier en étant saccagée, insultée, giflée…. C’est la seule solution.
Elle va aller en club, seule. Pas le club familier, presque amical, où ils avaient leurs habitudes, un autre, grand et anonyme. Elle ne choisit pas un club raffiné fréquenté par des gentlemen, tous directeurs des ventes ou de banques, elle choisit un club excentré, un club échangiste à l’ancienne, d’abattage, où elle serait sûre d’être maltraitée, malmenée, dans l’espoir d’alléger sa souffrance grâce à des hordes de banlieusards désœuvrés. La misère sexuelle s’étalant le long des sièges, faute de filles, et pour une fois, ils seraient comblés, tous, elle s’en fait le serment. Elle allait leur vider jusqu’à leur dernière goutte de sperme, s’offrir encore et encore, les faire crier de plaisir les uns après les autres, et ne récolter que des coups en échange.
Cela fait longtemps qu’elle n’est plus allée dans ce club, la dernière fois date d’avant lui. Elle n’en avait plus besoin, elle était heureuse, elle l’avait lui, qui illuminait tout de sa présence souriante et affectueuse. Ses tendances sacrificielles, masochistes, autodestructrices, ont été soigneusement enfouies dans les tréfonds de sa conscience, ensevelies sous des tonnes d’amour qui l’encombraient et l’enchantaient. Ses tendances se réveillent à présent, franchissent les barrières érigées effritées par l’absence de son enchanteur. Elles s’expriment enfin pleinement et se déchaînent. Certaines se scarifient, elle va se livrer à leurs mains impatientes et leurs sexes dressés. Elle a besoin de souffrir pour anesthésier la souffrance de son cœur.
Elle arrive, et tous se taisent dans le club. Il est tôt, il n’y a que des hommes. Ils sont là depuis l’ouverture, et prévoient de rester jusqu’à l’ouverture dans l’espoir de rentabiliser leur entrée. Ils ouvrent la bouche pour lui parler, lui conter fleurette, proposer un massage… mais elle pose un doigt sur ses lèvres pour leur commander de se taire. Dans l’espoir de la prendre, ils obéissent aussitôt, au garde à vous. Elle choisit celui qui lui plaît le moins, chenu et bedonnant, et l’entraîne dans la plus vaste pièce. Ils sont aussitôt suivis d’une horde d’hommes en rut, se masturbant déjà pour être fin prêt le moment venu. Tous se taisent, dans un silence quasi religieux. Ils devinent le lancement d’un gang bang et ne veulent pas briser le charme par une parole malheureuse. Ils s’organisent en silence autour d’elle. Elle attire déjà l’homme de son choix sur elle. Qu’il se démène sauvagement, ne fasse aucun cas d’elle, la prenne à sa guise pour prendre son plaisir. Elle se dérobe à ses baisers baveux, dégoutée, et plaque ses grosses mains sur ses seins, les presse. Oui, qu’il serre fort, à lui arracher les seins. L’homme sue à grosses gouttes, il s’adapte, veut se montrer à la hauteur, il sera vite remplacé sinon. Il la claque vigoureusement, et la pénètre d’un coup de rein, brusquement, sans attendre. Il la déchire, mais son corps, cette salope, mouille abondamment et accompagne ses coups de reins. Bientôt le sexe coulisse facilement en elle tant elle mouille, elle se détester de tant mouiller pour cet homme laid qui ne lui est rien, qui la traite mal. Elle veut être plus maltraitée encore. Qu’il a prenne plus fort, qu’il la déchire, la défonce… elle le pince fort pour réveiller le fauve en lui et il s’emballe enfin, tant et tant qu’il jouit, et s’empresse de laisser la place aux suivants. Ils ne se sont pas privés de malaxer ses seins, ses fesses, d’enfoncer leurs sexes dans sa bouche….
Enfin elle oublie tout, absente à elle-même. Elle s’envole, légère, elle quitte son corps souffrant, ivre de se donner, plus sûrement qu’avec une bouteille de vodka … Elle repousse vivement celui qui vient de jouir, elle en appelle d’autres, vite, avant que la souffrance ne s’empare à nouveau de son cœur. Ils sont prêts, déjà gainés de leurs préservatifs. Ils s’enfoncent en elle, la retournent, la font balloter en tous sens entre leurs bras, poupée de chiffons soumise à leurs désirs. Ils se démènent, perdent leur compassion, leur humanité, ils ne sont qu’instincts, laissant leur côté bestial s’exprimer. Elle n’est rien, pute de chantier, pute de parking gratuite, ils en profitent sans se pose de questions. Elle s’exalte, soulagée enfin de se vautrer dans la pornographie la plus sordide. Encore.
Elle se relèvera un jour, mais pour l’instant, elle a besoin de toucher le fond, d’être écrasée par mille corps qui n’en veulent qu’à son sexe, sextoy vivant ouvert à toutes leurs envies. Ils la lèchent aussi, très mal, leurs joues râpeuses égratignent la fine chair de ses cuisses, irritent ses lèvres intimes sensibles, mais elles ne se dérobent pas, se laisse limer par leurs langues dures et leurs bouches piquantes de barbe. Et soudain elle jouit, malgré sa peine, son chagrin, son sacrifice… le plaisir réussit à se faufiler en elle contre toute raison, et explose en un orgasme libérateur. Elle est furieuse contre elle, elle ne veut pas jouir, elle ne veut pas de plaisir, plus jamais elle ne jouira de sa vie. Elle maudit son corps en chaleur qui n’en fait qu’à sa tête et prend le contrôle, indifférent à ses démons. Elle s’offre de plus belle, appelant de sous vœux les étreintes les plus brutales, qu’ils froissent ses chairs, les pressent, les malaxent entre leurs mains moites. Qu’ils la prennent, tous, à la chaîne, jouissent et se retirent d’elle sans une parole, et qu’un autre l’emplisse, vite. Elle n’en peut plus de ce vide en elle. Elle veut être emplie jusqu’à ras bord, son sexe, sa bouche… encore…
Soudain c’est assez, elle a son compte.
Elle les disperse d’un signe de main, comme des insectes gênants, et se redresse. Ils s’écartent, ils comprennent que la fête est finie. Ils balbutient des remerciements, ils proposent un café, leur numéro… Elle n’a que faire de leurs belles paroles, elle se relève. Elle rejoint la douche, se lavant de toutes ses mains moites qui l’on palpée, ses langues et ses sexes qui l’ont salie, atténuant un peu sa douleur. Ses larmes coulent enfin, se mêlent à l’averse de la douche. La fatigue a raison de ses défenses, elle pleure enfin à chaudes larmes, des larmes invisibles sous la pluie chaude.
Elle s’en va sans se retourner, ignorant les appels des hommes, leurs protestations, se dégageant brusquement de ceux qui osent attraper son bras. Elle les giflerait.
Qu’est-ce qu’ils croient ! Ils ne sont rien pour elle, des hommes sans visage, interchangeables, des queues anonymes de toutes tailles. Ils ne sont que l’instrument de sa guérison. Elle reviendra demain, et tous les jours s’il le faut, des mois durant, sans jamais leur parler. Elle ne cherche pas une épaule, elle ne veut pas se faire des amis. Elle veut juste se faire baiser jusqu’à anesthésier sa douleur, éradiquer le manque pour le bon, éteindre cet incendie de souffrance qui la brûle jour et nuit, et gagne en ampleur au fil du temps à présent qu’elle mesure sa perte, et qu’elle n’est plus sonnée et abrutie comme au début.