Nouvelles priorités

Brewtnall_-_Sleeping_Beauty

   Un petit conte de fées détourné, pour m’amuser, en espérant que Perrault me pardonne 😉

***

   Confinée à la campagne, la princesse libertine sommeillait, en attendant le baiser qui la réveillerait. Pour l’heure, elle laissait d’autres préoccupations prendre le pas : elle préparait des gâteaux, semait des fleurs, écoutait les oiseaux, assistait émerveillée à l’éveil de la nature en ce début du printemps…
   Dès que les restrictions de déplacement furent levées, le prince se mit en route pour la retrouver. Il quitta sans regret son château cossu et cavala à bride abattue sans répit à travers monts et vallées, afin de réveiller sa belle libertine endormie.
   A son arrivée, il ne reconnut pas tout de suite son amante bien-aimée avec ce fichu de fermière et ce tablier de pâtissière. Que lui était-il arrivé ? Quelle tragédie ! La princesse frémit et son coeur se mit à cogner dans sa poitrine ; des souvenirs d’antan affluaient. La libertine ouvrit les yeux, brusquement réveillée par le parfum qui voletait jusqu’à ses narines – senteurs d’écurie, de cuir, de sueur virile – et le baiser léger que le prince déposa sur sa joue. Elle envoya au diable l’espèce de cuisinière-jardinière qui avait pris le pouvoir dans son esprit et repris ses quartiers. Quel sortilège avait donc pu l’endormir de la sorte ? Le bon air de la campagne, sans doute.

   La libertine régnait de nouveau en maîtresse ; son premier geste fut de jeter son tablier dans l’âtre et d’ôter son fichu.  Une cascade de boucles d’or dégringola sur ses épaules, ses yeux étincelèrent, tandis qu’une petite langue rose léchait ses lèvres encore plus roses.   
   Elle avait faim tout à coup.
   — Mon prince, enfin vous voilà ! Vous vous êtes bien fait attendre… Baisez-moi d’emblée et sans musarder !
   — La main, ma mie ?
   — Que nenni ! s’irrita la princesse.
   — La joue ? risqua le malheureux.
   — Bougre d’âne ! Mon cher, vous revoilà donc puceau, la peste soit cette longue séparation que nous avons subie !
   Confus, le prince compris enfin les soins que réclamait sa douce. Il s’exécuta sur le champ, brandit son épée de chair et la pourfendit avec fougue. Il la fourra, la besogna tant et si bien que la princesse s’enflamma, réveillée aux plaisirs de la chair. Elle le chevaucha longuement, jusqu’à des sommets oubliés.
   Le prince rendit les armes, épuisé par le voyage et la chevauchée fantastique de sa princesse. Quelque peu dépitée, elle s’enquit de sa suite : où étaient ses gens ?
   — Je suis venu seul ma mie, pour galoper au plus vite vers vous.
   — Quoi, pas le moindre petit page pour prendre soin de votre cheval ? Et de moi aussi peut-être, ajouta-t-elle modestement en battant des cils.
  — Venez avec moi au château, vous serez ma reine ! N’ayez crainte, la maréchaussée l’autorise, puisque me voici devant vous. Mon château regorge de pages, vous en trouverez à foison du vestibule au donjon ; ils n’attendent que vos ordres ! Et vous ne manquerez point de soubrettes à votre service… N’hésitez point, tout danger semble écarté, la menace s’éloigne, et nos mages ne lésinent pas, ils lancent des sortilèges à tout va.
   La princesse fit la moue. Ce retour hypothétique paraissait encore fort lointain. Là, il y avait urgence, elle ne pouvait différer son projet.
   — En attendant, puis-je mander le garçon de ferme ?
   — Faites, faites, rit le prince. Moi je suis rompu, mais j’aurai plaisir à vous reluquer ! Dès que possible j’organiserai des fêtes galantes dans les jardins, un grand bal masqué en votre honneur, je convierai tous les marquis libertins du royaume… Mais pour l’instant, vive les sauteries en petits comités, il faut nous en contenter.
   La princesse ne l’écoutait plus, affairée à sonner sa femme de chambre.
   — Va me quérir le garçon de ferme !

   Il se présenta bientôt, rougeaud et empoté, tournant entre ses doigts son chapeau de paille. La princesse n’hésita pas, elle le débarrassa de ses frusques toutes crottées, ne lui laissant que son caleçon ; elle ne voulait point le traumatiser. Elle jeta au feu ses habits de paysan, ils se joignirent à son tablier de cuisine qui se consumait toujours. Le feu crépita de plus belle, un feu de joie plein de promesses.
   — Tu viens d’être promu à mon service, cela te convient-il ?
   — Oui, bredouilla le garçon, qui n’en revenait pas de sa chance.
   — Il s’agira de satisfaire tous mes désirs sans discuter ! Si tu ne veux pas, ta place à la ferme t’attend…
   — Je veux bien, affirma-t-il, plus cramoisi que jamais, le coeur battant à tout rompre.
   Il commençait à deviner de quels services il s’agissait, son vit s’érigea malgré lui.
   — Tu vas d’abord te décrasser et enfiler des vêtements propres.
   Mais elle ne put attendre plus longtemps pour découvrir son engin, puisqu’elle avait son accord. Elle baissa prestement sa culotte. Le garçon rougit encore, sa verge durcit et s’exposa dans toute sa splendeur, ignorant sa confusion.
   — Fort bien, voilà qui fera l’affaire, et maintenant, au baquet ! Ma bonne va t’étriller.
   Le prince riait de bon cœur.
   — Ma mie, vous n’y allez pas par quatre chemins !
   — Il faut battre le fer tant qu’il est chaud ! Et je n’ai que trop attendu ! Deux mois passés en cuisine me suffisent amplement, j’enchaîne maintenant avec deux mois dans la chambre !
   La princesse en avait déjà assez de causer, elle se jeta sur la verge du prince et se fit fort de la ranimer. Elle ne ménagea point sa peine et fut récompensée par une belle érection.

   Le garçon de ferme choisit ce moment pour réapparaître, les joues roses et les mains propres. Il avait eu le temps de se détendre sous les attouchements et les gâteries de la servante ; il était devenu un homme et se sentait à la hauteur de la noble tâche qui l’attendait. La princesse s’attendrit, il était mignon comme tout déguisé en page, les traits délicats en moins. Il restait bruni par le soleil et musclé par les durs travaux de la ferme.
   — Et voilà, j’ai un page à moi, se félicita la princesse toute contente en battant des mains. Grimpe donc sur le lit, nigaud.
   Elle se sentait pleine d’appétits, mais pour un autre genre de gâteaux que la veille. Ils se révélèrent tout aussi savoureux ; finalement, on ne se trouvait pas si mal à la campagne !

   Tableau : Edward Frederick Brewtnall « Belle endormie »

4 commentaires

  1. Antares a écrit :

    Bonjour
    Nouvelles priorites… humm… in delice

    1. Clarissa a écrit :

      Merci ! Nous tous bientôt, j’espère (enfin presque)

  2. Clarissa a écrit :

    Merci Albin ! Tu ferais un bon page alors voire un prince charmant !

  3. Albin a écrit :

    Bel appétit de Princesse. Je m’y soumettrai sans discuter 😊

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