Le consentement

Le consentement, on en parle souvent et c’est très bien !
Il était déjà présent depuis toujours dans les pratiques BDSM, et s’est enfin imposé dans toutes les relations sentimentales et sexuelles, du libertinage à la vie conjugale. C’est aussi le maître-mot des soirées que j’affectionne, et c’est pour cela que l’on peut s’amuser autant, sans souci d’abus d’aucune sorte !

Au-delà de cette sphère sensuelle, je trouve qu’il devrait investir tous les domaines !

(Même s’il y a plein de choses dans la vie pour lesquelles on n’est pas vraiment « consentants », mais on n’a pas trop le choix : payer des factures, aller chez le dentiste…
Au travail, c’est parfois un peu compliqué aussi, il y a toujours des tâches sur lesquelles on renâcle. Je n’étais pas toujours consentante quand mes chefs me demandaient certains trucs, mais je les faisais quand même, en maugréant d’un côté, et avec un certain plaisir malsain aussi, pourvu que mes chefs rayonnent d’intelligence – on se console comme un peu, et un brin de masochisme aide !)

Mais dans le monde des loisirs, des distractions, le consentement devrait s’imposer sans équivoque (à quelques bémols près : par exemple, il faut se mettre au solfège si l’on veut jouer d’un instrument de musique – on n’était pas consentant pour se coltiner le solfège, mais cela semble un passage obligé – , et apprendre certaines techniques si l’on veut peindre, sculpter, coudre ou tricoter, etc… Il existe toujours une partie contraintes qui ne nous plaît pas forcément, mais on y consent malgré tout, car on est très motivés par l’activité ! Et parfois, l’on peut consentir à certaines positions ou jeux érotiques qui ne nous tentent guère a priori, pour le plaisir de faire plaisir à notre partenaire !)

En revanche, quand quelqu’un bafoue sciemment notre consentement, ça ne passe plus !

Tout récemment, je suis allée à une soirée lambda (ni kinky, ni fetish, ni bdsm, tout simplement dansante), attirée par la perspective de danser le rock.
Un homme élégant m’invite, il guide très bien, vraiment bien, un danseur de compétition qui a mille passes dans son sac. Je tourne dans tous les sens, je m’envole, bientôt à bout de souffle, mais je continue, tant qu’il veut danser avec moi ! Je succombe à sa poigne de fer, tourbillonnante dans cette danse BDSM qui ne porte pas son nom.
Lors d’une passe où il m’emprisonne le cou de son bras musclé (j’aime bien), il me chuchote à l’oreille :
— Tu me suis bien, on va passer à la vitesse supérieure !
Et là, il me fait littéralement tournoyer comme une toupie, je ne m’appartiens plus, je me livre à lui corps et âme ! S’il ne me retient pas, je vais valser à l’autre bout de la salle ! Mais il me maintient d’une main sûre et fait tout ce qu’il veut de moi (j’adore ! Sur du bon rock en plus ! Ce qui n’a pas toujours été le cas avant ^^).
Mais soudain, patatras.
Un peu anxieuse quand même, j’ose une remarque lors d’une passe qui nous rapproche un instant :
— En revanche, je préfère éviter les passes acrobatiques.
(Je devine que ça le démange, et j’ai de mauvais souvenirs de mes soirées d’étudiante : je m’étais retrouvé les quatre fers en l’air un soir, et une autre fois, ma chaussure avait volé jusqu’à l’autre bout de la salle, et j’avais dû la chercher ensuite dans l’obscurité, clopin-clopant)
— Tu as le gabarit parfait pourtant, je pourrais te soulever sans problème !
Et hop, il joint le geste à la parole, il me soulève dans les airs pour une passe acrobatique ! Soft, certes, je n’ai pas fait de la haute voltige, mais quand même, je ne touchais plus le sol pendant plusieurs secondes d’éternité, tout en tournant à la vitesse de la lumière.
J’atterris de nouveau sur le plancher des vaches, un peu choquée.
Qu’est ce qui n’était pas clair dans ma phrase « Je préfère éviter les passe acrobatiques » ?
Pourquoi est-il aussitôt passé à l’acte à peine ai-je osé m’exprimer mes réserves ?
Est-ce qu’il a voulu me montrer l’étendue de ses talents ? M’impressionner ? Piétiner ma volonté ? Balayer mes limites d’une main sous mes fesses ? Jouer les mâles conquérants qui emportent leur captive sur l’épaule comme un vulgaire sac de pomme de terre ?
– En réalité, je dois le reconnaître, j’ai aimé ce court voyage dans les airs (l’adrénaline ! La sensation physique d’envol !), mais : je n’étais pas consentante, et qu’il se soit assis sur mon consentement au moment pile où je l’exprimais, ça m’a contrariée, refroidie et gâché le plaisir.

Je lâche sa main, je préfère arrêter là même si le morceau n’est pas fini. Je vais reprendre mon souffle sur une banquette, étourdie et au bord de l’évanouissement (il faut vraiment que j’améliore mon cardio ou que je choisisse des rocks plus lents). Ce cuistre ne me demande pas si je vais bien, ne me propose pas un verre d’eau, il s’en va aussitôt faire le beau ailleurs. Moi je suis passée en deux minutes de : « quel Dieu vivant ! » à « quel déplaisant personnages alors » !
Je songe un instant à quitter la soirée, j’ai eu ma dose, mais la musique me rappelle bientôt sur le dance-floor. Je me dis que c’est comme le vélo, il faut tout de suite se remettre en piste ! Pour un malotru trop sûr de lui, il existe dix gentlemen attentionnés (au moins). Et tous les hommes ne sont pas des danseurs de compétition, je devrais pouvoir éviter d’autres passes dans les airs.
Tant qu’ils ont le rythme, ça m’est égal de refaire les trois mêmes passes à l’infini, pas besoin de varier pour le seul plaisir de varier. Le plaisir est ailleurs, il est dans la connexion, le rythme, la musique…
(tiens, c’est comme faire l’amour : pourquoi enchaîner frénétiquement plein de positions, alors que le plaisir se trouve dans la transe, la lenteur, la répétition, la fusion, la connexion – enfin, je trouve )
J’avise un homme sur le côté, petit échange de regards et de demi-sourires, et il m’invite à danser. Et là, je tombe sur un vrai gentil, moins pro, certes, mais que du bonheur !

 

– Photo : Fred Astaire et Ginger Rogers

2 commentaires

  1. Cédric a écrit :

    J’adore lire vos articles ,
    En plus pratiquant le bdsm donc je vous suit sur les réseaux au nom de Cédric Deroite .
    Continuer à écrire vous m’avez donner m envie de me remettre à lire .
    Bien à vous
    Cédric

    1. a écrit :

      Merci Cédric, votre message me fait plaisir ! Je suis souvent tiraillée entre « sortir et vivre » et « lire et écrire » …

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