Dans ma série les kinks et pratiques BDSM, une petite histoire de fétichisme des uniformes 🙂 Ce n’est pas la première du genre je crois, mais quand on aime, on ne compte pas !
Propos liminaire, vu le contexte actuel :
Je suis pacifiste et ne cautionne aucune guerre ou agression, évidemment !
— Ce qui ne m’empêche pas d’apprécier les uniformes… nous sommes des êtres complexes et paradoxaux !
Il y a toujours une ou deux casquettes fetish dans les soirées en France, mais ce n’est rien au regard des soirées à Berlin ! Je ne savais plus où donner de la tête tant j’étais entourée de casquettes, et conquise ! Cela m’a inspiré une petite histoire…
— Si l’uniforme est vrai (j’ai même identifié son origine : Serbie), l’histoire est inventée, hélas 😉
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Claire adore les uniformes, elle se sent toute chose devant un militaire, un marin ou un policier en tenue d’apparat ou de combat. Attirée comme un papillon, bientôt brûlante de désir, elle s’approche, leur tourne autour….
Cela ne fonctionne pas avec n’importe quel uniforme, ce serait trop facile ! Les galons et la casquette ne suffisent pas, il y a aussi l’engagement qui va avec, le don de soi, les valeurs de courage, que ce soit pour protéger les personnes ou son pays… Pour faire simple, un uniforme de groom d’hôtel ou de marine marchande, c’est sympa, mais ça ne réveille pas ses fantasmes !
Son fétichisme des uniformes possède des racines profondes, mais Claire n’a pas trop envie de creuser le sujet, heureuse comme ça. Sans doute, on ne se remet pas d’une enfance auprès d’un père paradant dans le plus bel uniforme qui soit, bleu marine orné de galons vieil or. Claire n’a pas envie de démêler cet éventuel nœud Œdipien, elle préfère s’adonner à sa passion et assouvir son fétichisme à sa façon.
Après des années à écumer les sites de rencontres et tenter de séduire des policiers et des militaires, elle se tourne vers d’autres terrains de chasse, fatiguée de trembler pour de vrais policiers, et lassée des voyages incessants des vrais militaires… Elle se tourne vers les jeux de rôles, les reconstitutions historiques, avant de découvrir de fil en aiguille les soirées fetish où les uniformes ont aussi la côte. Elle les fréquente toutes, mais les uniformes ne sont jamais assez nombreux à son goût.
Cette fois, elle n’hésite pas, elle prend l’avion, pour le plaisir de participer à une soirée, encouragée par son complice de toujours.
Les soirées fetish jouent toujours avec la transgression, et quand on souffre d’un fétichisme de l’uniforme, mieux vaut se rendre là où les uniformes sont le plus tabou, dans le pays le plus pacifiste qui soit, par la force des choses. Un pays où c’est vraiment transgressif de revêtir un uniforme : l’Allemagne
Effectivement, son instinct ne l’a pas trompé ! La soirée regorge de casquettes de tous les pays et de toutes les époques, avec une prédilection pour les vastes casquettes des pays de l’Est des années 60 et parfois même quelques inspirations plus dark — en plein cœur de Berlin, transgression suprême ! Ces casquettes noires relevées, elle les évite, danger suprême.
Claire déambule dans le labyrinthe de couloirs et de salles en enfilades : donjons BDSM, salles « médicales », piste de dance techno rivalisant avec le meilleur son qui soit – elle en compte au moins trois – , des bars, des coins sombres, et même une piscine ! Les lieux sont magnifiquement décorés, la musique techno pulse dans ses oreilles et gagne tout son corps, des performances fetish se déroulent sur plusieurs scènes, magiques et bizarres… Elle a l’impression de se promener dans un rêve éveillé !
Elle danse, erre, le regard aux aguets, et ne s’arrête que le temps de frayer avec tel ou tel uniforme. Un policier fetish la retient un instant, tout comme un capitaine d’infanterie d’origine inconnue, et aussi un officiel de la navale qui brille tout en blanc…Une fois qu’elle a bien regardé, posé ses doigts sur les décorations, caressé les boutons dorés, examiné la casquette, palpé les insignes… elle s’éloigne, comblée un instant, avant de repartir en quête d’autres uniformes. On essaie de la retenir parfois, le temps d’une autre danse, ou pour des projets moins avouables peut-être, mais sa quête continue, elle s’envole.
Soudain, elle l’aperçoit du coin de l’œil : un magnifique uniforme bleu. Elle se lance à sa poursuite telle Alice suivant le lapin blanc. Elle se faufile à travers la foule, le perd de vue parfois, avant de repérer à nouveau une casquette bleu ciel en train de franchir une porte.
Il marche vite, il fend la foule et se joue d’elle comme si elle n’existait pas. Claire traverse à sa suite quantité de salles, se perd avec lui, s’engage dans des souterrains, surprend mille scènes troublantes, mais rien ne peut la détourner de lui, elle veut le retrouver plus que tout.
Elle est sur le point de se décourager, fatiguée de courir en vain. Elle retrouve son ami, s’efforce d’oublier ce militaire d’opérette et de s’amuser, quand un éclair bleu passe à vive allure tout près d’elle. Son bel uniforme ! Elle plante aussitôt son ami et se lance discrètement à sa poursuite.
Il s’est enfin arrêté. Il s’accoude à la balustrade d’une mezzanine et regarde avec un certain détachement les environs. Elle se campe devant lui toute honte bue, ivre sans avoir bu, armée d’un courage inhabituel : l’audace de l’étrangère qui n’est que de passage et ne connaît personne. Elle le dévisage, subjuguée par son allure martiale. Est-ce enfin lui, l’uniforme de ses rêves, qu’elle espère depuis si longtemps ?
Mi général mi prince charmant, cintré dans son uniforme bleu ciel d’été aux plis impeccables, les mains gantées de blanc, les galons et les boutons dorés brillant de mille feux, de grandes bottes de cuir noir lustrées… Il se soumet tranquillement à son examen, sans sourire. Il la regarde de ses yeux aussi bleus que le tissu de son uniforme et Claire se liquéfie peu à peu. Elle trouve enfin le courage de lui adresser la parole.
— Votre uniforme est superbe, est-ce que c’est un vrai ?
Elle se mord les lèvres ; évidemment que c’est un vrai ! Il la fixe sans répondre, fait durer le moment. Le temps est suspendu, Claire voudrait s’enfuir. Ce silence, c’est comme un refus, une claque, mais elle reste plantée là, retenue par une chaîne invisible.
L’air se rafraîchit tout à coup autour d’elle, la soirée disparaît. Sa tête tourne, ses oreilles bourdonnent. Elle se retrouve dans un brouillard blanc, des flocons de neige tourbillonnent et les enveloppent, elle et le bel uniforme. Ils sont étrangers, mais se comprennent parfaitement. Il vient de conquérir son pays, il réclame son dû. Elle est d’accord, elle veut bien être le tribut de guerre, elle se rend, il peut la pourfendre de son épée personnelle, tout de suite, se contenter de sortir son sexe et la prendre directement. Sans enlever son uniforme surtout.
Mais au lieu de cela, il s’incline galamment et lui propose un verre. Claire reprend ses esprits, elle entend à nouveau la musique techno, sent la chaleur des corps qui dansent et s’étreignent tout autour. Elle soupire… un verre… alors qu’elle bout d’impatience depuis des heures ! Il faudra trinquer, discuter, s’ennuyer pendant de longs préliminaires, et, pire que tout, il voudra sans doute enlever son uniforme… Pourquoi tout ce temps perdu alors qu’elle est conquise déjà ! Elle est à lui, qu’il la prenne sans autre formalités ! Elle se prépare à prendre son mal en patience avant de changer d’avis. Elle vient de parcourir 1000 km pour faire ce qu’elle veut, elle ne connaît personne ici à part son pote, alors au diable les convenances et le souci du qu’en dira-t-on.
Claire plante ses yeux dans les siens et affronte le feu glacé de son regard sans fléchir. Elle refuse le verre en le remerciant, elle accepte tout le reste en revanche. Elle se lèche les lèvres et le regarde effrontément. Le militaire ne s’y trompe pas un instant. Il la soulève de terre, la charge sur son épaule et se prépare à lui faire subir les derniers outrages dans un recoin sombre.
Claire sursaute quand on lui tapote l’épaule. Son ami ! Il la regarde d’un œil goguenard, elle a dû s’assoupir quelques minutes.
— On y va ? propose-t-il en souriant. Je suis crevé moi aussi, et la soirée se termine.
Claire lui emboîte le pas comme une somnambule en jetant des coups d’œil autour d’elle dans l’espoir de revoir son bel uniforme
— Tu as remarqué l’homme avec un superbe uniforme bleu roi ?
— Non, mais tu sais, j’ai surtout regardé les filles !
— Tu n’as pas pu le rater, c’était le plus beau de tous ! Le plus authentique, fignolé jusqu’au gants blancs ! En plus, je suis restée un long moment avec lui…
Il compte sur ses doigts, taquin.
— Voyons… je t’ai vue de loin avec un « policier » aux bas résille, un marin de la croisière s’amuse, un haut gradé digne de Sissi l’impératrice, deux ou trois casquettes en cuir… mais un uniforme bleu non, ça ne me dit rien, tu es sûre que tu n’as pas rêvé ?
— Je te promets que c’est vrai ! Je te le montrerai sur les photos !
Quelques jours plus tard, les photos de la soirée sont enfin publiées sur le site. Claire se précipite, elle fait défiler nerveusement des centaines de photos dans l’espoir d’apercevoir son bel inconnu. Il devrait y être, tous les participants se sont fait photographier dès leur arrivée comme des stars, une sorte de passage obligé après la porte d’entrée, avant la plongée dans le grand bain.
Il fallut pourtant se rendre à l’évidence : il n’a pas été photographié, ni à son arrivée, ni plus tard pendant la soirée. On n’aurait vu que lui, en bleu parmi une multitudes de tenues fetish noires.
Claire s’assombrit. Ce sera long d’attendre la soirée de l’année prochaine, en espérant qu’il réapparaisse et l’enlève à nouveau. À moins de repérer d’autres soirées fetish étrangères, qui sait… ou d’en organiser une en France ! Dress code : uniformes ! Uniformes civils acceptés, infirmières, professeures… et uniformes engagés fortement encouragés ! Sur le flyer, elle proposera de mettre un uniforme bleu… un signe qui lui sera adressé en secret. Il n’y a plus qu’à motiver ses organisateurs de soirées préférés…
Première photo prise sur le net, créditée ou retirée sur simple demande
Seconde photo : Film Anna Karenine