La mécanique sexuelle des hommes

mécanique sexuelle
   Jeudi dernier, l’Institut pour l’Harmonie Sexuelle a organisé une conférence. Nathalie Giraud-Desforges, sexothérapeuthe et fondatrice de Piment Rose, le Dr Claudie Coudereau, médecin et créatrice de l’institut, et le Dr Pierre Desvaux, sexologue et andrologue, nous ont expliqué les mystérieux ressorts de la sexualité masculine, psychologiques et physiologiques.

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   1. L’excitation

   L’excitation entraîne l’érection.
   Les sources d’excitation sont multiples, notamment visuelles. Le porno a toujours existé, on trouve des fresques de sexes en érection dans les lupanars antiques, sur des temples en Inde… La différence, c’est qu’aujourd’hui il est bien plus accessible et il est difficile d’y échapper.
   L’homme, comme les singes supérieurs, a perdu son instinct sexuel. Il est dans la recherche du plaisir. Il peut devenir « addict » au sexe, car le cerveau addictif est très développé chez les humains — c’est une ruse de la nature destinée à la procréation : comme c’est bon, on a envie de recommencer le plus souvent possible !  Le sexe n’est pas inné chez l’homme, comme chez le singe supérieur, il se découvre par imitation.  

   2. L’érection

   L’érection ne survient pas à l’adolescence, mais bien plus tôt, les bébés peuvent naître avec un pénis en érection, ou même en avoir in utero. Les enfants recherchent vite le plaisir en se touchant, sauf si des injonctions parentales ou la morale judéo-chrétienne leur interdit la masturbation. La transgression, les interdits, peuvent d’ailleurs aussi éveiller leur curiosité. Les garçons jouent tout de suite avec leur pénis, car il se voit, il change d’aspect. Ils se comparent entre eux, s’interrogent sur sa taille, sa forme…

   Bander va obséder l’homme toute sa vie, cela conditionne le fait d’être un homme, alors que « mouiller » ne va pas impacter la vie des femmes plus que ça. L’homme se sent vulnérable face à l’imprévisibilité de son érection, qu’il ne peut contrôler par sa volonté.

penis-coupe
   Le pénis n’est ni un muscle, ni un os. Depuis la renaissance, on sait que c’est la pression sanguine qui le fait durcir. Les corps spongieux et caverneux gonflent comme des éponges grâce au sang arrivant par les artères, et compriment les veines périphériques, empêchant le sang de repartir. Le pénis se déploie comme un accordéon, sa membrane s’affine en s’étirant. Il peut se « fracturer », en érection uniquement, en cas de torsion.
   Le gland, lui, reste doux. Il ne durcit pas afin d’assurer une pénétration plus agréable pour la femme.

   Les soucis de l’érection
   On ne parle plus d’impuissance, mais de dysfonctionnements érectiles.
   Les raisons peuvent être physiologiques ou psychologiques.

   Raisons psychologiques
   Les problèmes d’érection peuvent subvenir en raison de la peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas réussir à donner du plaisir à une femme. Aujourd’hui, la pression de la société est très forte pour faire jouir les femmes, elles attendent deux, trois orgasmes à chaque rapport. (Les hommes qui ont des soucis d’érection parviennent pourtant à bander pendant les fellations, car ils s’abandonnent, ils sont libérés de l’obligation de faire jouir la femme).
   Les femmes constatent que leur compagnon rencontre des problèmes d’érection et, devant le manque d’explications de leur part, pensent qu’elles ne sont plus désirables. Elles ne leur plaisent plus ! Les hommes devraient leur dire qu’ils ressentent du désir, et oser avouer que leur érection ne suit pas, mais cela leur est difficile.
   Des malentendus naissent dans les couples, avec des stratégies d’évitement : madame se couche tôt, monsieur tard. L’homme nie souvent le problème, évite d’en parler. La situation s’enlise, parfois plusieurs années, avant l’explosion et la décision de consulter un spécialiste.
  Les problèmes d’érection suscitent la honte, sont lourds à porter ; l’homme a peur d’être jugé, même s’il rencontre un thérapeute. Certains rebroussent même chemin une fois arrivés devant la porte du spécialiste !

  Des médicaments peuvent être prescrits pour favoriser l’érection, même s’il n’y a aucun problème de santé, afin de « faire repartir la machine » et redonner confiance en soi. Le Viagra n’est pas très pratique, il faut le prendre 1h avant le rapport, le Cialis évolue plus lentement et plus longtemps. En en prenant un peu tous les jours, le patient regagne confiance en lui.
   Tout homme ou presque connaîtra une panne passagère un jour (1 homme sur 2 à partir de 60 Ans). C’est parfois le début d’un cercle vicieux, car l’homme appréhende la prochaine fois, se met la pression, et la peur de l’échec provoque la panne.
   L’âge ne provoque pas systématiquement des pannes, les hommes ne sont pas égaux ! L’érection peut cependant devenir moins forte, durer moins longtemps, la sensualité sera alors privilégiée, la tendresse aussi.

   Raisons physiologiques
   – à partir de 50, 60 ans, faire un bilan médical. Le diabète, l’hypertension, les problèmes cardiaques, le cancer, peuvent provoquer des troubles de l’érection (« le sexe est une fonction de luxe », l’érection se manifeste quand tout va bien)
   Les dysfonctions érectiles peuvent être un symptôme « sentinelle » c’est-à-dire arriver 2 ans avant un problème cardiaque ou vasculaire, ne pas sous-estimer les pannes et consulter !
   – Une opération de la prostate empêche l’éjaculation, mais ne rend pas systématiquement impuissant. A condition que son nerf érecteur soit préservé, l’homme peut recouvrer des érections entre 6 mois à 2 ans après son opération.
   – La testostérone peut diminuer avec l’âge, celle qu’on fabrique ou même celle qui est « bio disponible » (Beaucoup de testotérone peut être stockée par le foie qui secrète une protéine qui la capte chez les bons vivants). Simple à traiter grâce à des hormones.  
– Le priapisme est le souci inverse : l’érection dure trop longtemps. Au-delà de 3h, consulter les urgences, car les dégâts peuvent être irréversibles.

   Quelques astuces, en dehors des médicaments, pour avoir une érection, l’améliorer, la maintenir :
   – Bien s’informer, ne pas prendre les acteurs pornos comme référence de la normalité, ils sont tous sous Viagra, ou ont même reçu une injection dans le sexe.
   – Méditer, visualiser des scènes positives, réaliser de l’auto-hypnose érotique.
   – 2 verres d’alcool pour se détendre (certains vont jusqu’à 3 ou 4 car cela retarde l’éjaculation, ce n’est pas conseillé ! Plus, c’est inefficace)
   – Comme d’habitude : 5 fruits et légumes par jour, faire du sport, ne pas fumer dit-on. Tout ce qui est bon pour le cœur est bon pour le sexe ! Mais ce n’est pas suffisant :
   Il faut aussi avoir de nombreux fantasmes pour bander, une « malice sexuelle », un grain de folie, un imaginaire animé… Les hommes « trop raisonnables » ou ceux qui recherchent des performances, ont des soucis d’érection, et même si les femmes les épousent, elles préfèrent baiser avec des bad boys, car les hommes trop sages les ennuient.
   – Ne pas se contenter de « faire le castor », c’est à dire tout faire avec sa queue : varier, embrasser, lécher sa partenaire ; l’érection viendra naturellement.
   – Respirer, ne pas rester en apnée, récupérer une respiration ample, abdominale. Se détendre, s’apaiser.
   – Muscler son périnée, le contracter, décontracter. Faire les « exercices du cerf », pratique taoïste qui allie respiration et périnée.
   – Se recentrer sur les sensations, le visuel, focaliser sur le moment présent.
   – S’exercer à une « masturbation revisitée » : se caresser différemment, tout le corps, changer les circuits de plaisir.
   – « Communiquer pour mieux niquer » : exprimer ce qui se passe en soi à sa partenaire.
   – L’érection intervient si on se sent en sécurité. Fermer la porte si on a des enfants, installer un verrou pour éviter des venues spontanées.
   – S’intéresser à l’amour tantra : faire l’amour en douceur, lentement, tendrement. L’homme reste immobile, connecté à sa partenaire, il fera l’amour plus longtemps, et son éjaculation sera plus abondante.
   – Il n’est pas nécessaire d’avoir une érection dure pour pénétrer. La femme peut jouir même si le sexe n’est pas complètement en érection. Attention cependant, faire l’amour en « bandant mou », peut entraîner le glissement du préservatif et son oubli au fond du vagin ! A réserver aux couples qui n’en utilisent pas.
   – Serrer la base de la verge, ou mettre un cockring, pour garder la bandaison plus longtemps en comprimant le sang.

   3. L’éjaculation

   Distinguer l’orgasme, l’éjaculation et la jouissance :
   – L’orgasme est une tempête d’hormones dans le cerveau (dopamine, endorphines, prolactine)
   – L’éjaculation est l’émission du sperme, elle est déclenchée par l’orgasme
   – La jouissance est une sensation subjective de plaisir, elle varie tout le temps.
   Il est possible d’avoir un orgasme et du plaisir sans éjaculer (en cas d’opération de la prostate par exemple, ou d’orgasme avorté), ou d’avoir un orgasme et une éjaculation sans plaisir (si l’orgasme intervient trop tôt par exemple).

   L’éjaculation est dite prématurée, plutôt que précoce, quand elle intervient en moins d’une minute, sans contrôle, et entraîne une souffrance psychologique.
   A noter que le coït humain est programmé pour durer 8 mn en moyenne ( 1/2 heure pour les rhinocéros, d’où la légende sur leur corne)
   On peut prescrire de la Paroxitine, un anti dépresseur qui retarde l’éjaculation, et va augmenter l’estime de soi, mais le sevrage peut être difficile.
   Contrairement aux a priori, la circoncision ne retarde pas l’éjaculation.

   Pour ceux qui ont du mal à éjaculer, il n’existe pas de médicaments. C’est aussi un souci pour les hommes qui en souffrent, car les femmes attendent ce moment, elles sont déçues, se questionnent si l’homme n’éjacule pas.
   22 % des hommes ont donc déjà simulé. La simulation est un piège, pour les hommes comme pour les femmes, car c’est dur de revenir en arrière ensuite, madame se vexerait.
   Il leur est conseillé de pratiquer la levrette, position souvent irrésistible car c’est une position primitive, et de se « masturber dans le vagin », en pensant à des fantasmes.

   L’homme peut être multi orgasmique : ressentir des orgasmes répétés, au début avec éjaculation, puis des « semi-éjaculations », avec peu ou pas de sperme. Le gland doit être toujours stimulé, et l’homme doit veiller à garder un rythme rapide. C’est assez douloureux, il faut être motivé ! (Si madame s’assoit sur monsieur et continue à bouger, plus lentement qu’un homme le ferait, l’érection persiste aussi, même en cas d’éjaculation, et d’autres orgasmes peuvent se produire, avortés en série, comme par exemple pendant le slow sex.)
   L’homme doit apprendre à s’arrêter pile poil pendant la montée du plaisir avant le point de non-retour (attention, une goutte peut quand même être lâchée, et c’est la plus fécondante). L’érection perdure après ces orgasmes incomplets, c’est agréable, l’homme peut faire l’amour plus longtemps.
   Un homme peut aussi éjaculer 2, 3, 4 fois de suite, en laissant passer la période réfractaire : une petite demi-heure, ou un quart d’heure à chaque fois, mais tous les hommes ne sont pas tous égaux, certains ont besoin de plus de temps.
   La plupart des femmes ne connaissent pas de période réfractaire, elles peuvent recommencer tout de suite, mais certaines ressentent l’envie de dormir comme les hommes.
   À noter que les hommes n’aiment pas qu’on leur touche le gland après l’éjaculation, tout comme les femmes n’aiment pas qu’on leur touche le clitoris après avoir joui, il est trop sensible.
   Si l’on fait l’amour trop longtemps, on peut se provoquer des maux de tête, car on secrète du monoxyde d’azote, les hommes comme les femmes.

    Les différents types d’orgasmes similaires chez les hommes et chez les femmes :
   – l’orgasme vaginal : on surfe sur la vague, on jouit sans explosion, comme l’orgasme prostatique ou anal.
   – l’orgasme clitoridien : on ressent comme une explosion, électrique, externe, comme l’éjaculation.
   Avec les nouveaux sextoys type Womanizer (aspirateur à clitoris très doux), les femmes peuvent jouir trois, quatre fois d’affilée. Les hommes peuvent aussi jouir plusieurs fois de suite quand ils stimulent leur prostate en contractant le périnée.
   – l’orgasme profond ou utérin : on implose de l’intérieur, cela ressemble à l’éjaculation et à l’orgasme clitoridien en plus fort, il monte à la tête. On peut retrouver presque le même chez hommes en associant un orgasme prostatique via les doigts ou un gode et la stimulation de la verge en provoquant une éjaculation. Ce double plaisir accentue vraiment la jouissance. C’est un orgasme à travailler, à apprivoiser.
   Les femmes paraplégiques peuvent ressentir des orgasmes, malgré l’insensibilité de leur clitoris, par la stimulation du nerf vague du col de l’utérus. C’est un orgasme plus viscéral, proche de l’orgasme prostatique. Elles ressentent en réalité un orgasme vaginal.

   En conclusion, le plus important :
   Si l’homme ose être à l’écoute de ses perceptions, mettre des mots sur ses émotions, se livrer, être « présent »… s’il ose ouvrir son cœur, s’autoriser à aimer, lâcher son besoin de contrôler ou de performance ; il y aura un véritable échange entre les deux partenaires. La sexualité devient alors magique !
   Un sexe dur n’est pas essentiel, car même avec un sexe « mou », la femme peut jouir, et si l’homme s’abandonne enfin, lâche prise, il pourra la rejoindre au 7ème ciel. Ses problèmes d’érection ou d’éjaculation s’évanouiront.

   Je pense aussi à cette citation de Gaspard Proust 😉 :
  
« Quand on sait que 80% des femmes sont clitoridiennes, à quoi bon s’acharner à bander ? »

   Prochaine conférence le 11 juin 2020 : « La mécanique sexuelle des femmes »
  
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