Après un début de week-end agité et tourmenté : aboutissement !
Chap.2 Baiser enfin
Il s’interrompt, essoufflé, après sa phrase débitée à toute vitesse, d’une traite… Il redoute sans doute que je m’envole à nouveau dans mes pensés, ça craint ! Mais il a retenu toute mon attention, je le regarde, incrédule ! Je veux être sûre, avant de m’autoriser à bondir de joie après avoir imaginé le pire, j’ai peut-être rêvé, encore.
— Quoi ?!
— Baisons ! Cela fait des semaines que l’on n’a pas fait l’amour, pris dans nos obligations, la fatigue, les débuts de grippe… il y a toujours de bonnes raisons, la flemme aussi, qui s’installe avec la vie en commun… Je suis tout aussi coupable que toi avec mes jeux vidéo, les séries… je voudrais arrêter cette espèce de fuite en avant qui nous éloigne, et nous retrouver vraiment… Nous extirper de notre canapé m’a semblé une première étape, sans ordinateurs, sans télé…
Je tombe des nues, je suis interloquée, je ne trouve rien à répondre, mais mon corps lui, répond d’emblée, se tend de désir vers lui, toute tension, irascibilité envolée. Je le désire tant que la suite de son discours sur la déconnexion se perd dans le brouillard. Être prise, fort, serrée à en étouffer, écrasée, pilonnée, aimée… mais oui ! ça me manque tellement aussi, pourquoi je ne m’en rends même pas compte ? C’est pour cela que je suis toujours prête à montrer les dents, à l’accabler de reproches ? Je me bats un peu pour la forme et garder la tête haute, avec une pique dont j’ai le secret :
— Tu me considères comme une mal baisée, c’est ça !
— Oui, et j’en assume l’entière responsabilité, trinquons !
Il ouvre tranquillement une bouteille de champagne, impassible, quand je bous des pieds à la tête, sur des charbons ardents. Je contemple ses bras, ses joues… j’ai envie de tout dévorer ! Comment ai-je pu l’ignorer si longtemps, alors qu’il est à portée de mains ? L’habitude, le train-train… Je comprends enfin cette escapade romantique calamiteuse : nous déraciner de notre cocon et de nos loisirs addictifs. Le pauvre, il s’est donné du mal…Mais finalement, c’est bien que la météo nous cloue dans notre chambre, vu le projet.
Une gorgée de champagne pétille dans ma bouche et me monte à la tête, mmmm délicieux, même si je rêve de goûter autre chose. Je considère sa bouche, son cou, et je veux plus ! Le champagne me donne de l’audace, mes réserves s’envolent, et puis c’est mon mari après tout, pas besoin de jouer les vierges effarouchées. Je bats des cils en espérant avoir l’air glamour, et demande :
— Enlève ton tee-shirt !
Il sourit, et l’enlève tranquillement, dans un geste qui me trouble comme jamais, je dois ressembler au loup de Tex Avery ! Ses épaules rondes qui appellent mes mains, ses bras musclés qui pourraient me briser, son torse parfait… Il n’y a rien de plus beau qu’un corps masculin ! En particulier chez ceux qui pratiquent l’escalade… Mon chéri, lui, c’est la natation, l’eau l’a musclé harmonieusement partout et poli sa peau. J’ai beau le connaître par cœur, le moindre grain de beauté, sa cicatrice de guerre (l’appendicite), il émane de son corps une aura, un magnétisme qui m’attire comme un papillon de nuit… J’ai bien tenté les filles plus jeune, mais je suis désespérément hétéro, ce que je déplore, c’est totalement has been, en plus je reste totalement accro au même homme depuis plus de dix ans, ce qui est encore plus has been en ces temps d’amour libre… Mais au fil du temps, j’ai oublié que je le désirais tant, et je ne faisais que le tourmenter, le critiquer, le maltraiter… J’ai honte de tout ce qu’il a supporté ! Heureusement qu’il a le dos large… et musclé ! Bien sûr que la solution à tous nos soucis c’est de faire l’amour ! Et le champagne aussi, pour une note festive et élégante, on n’est pas des bêtes… On va finir alcooliques c’est sûr, j’aime trop ça, deux vieux alcooliques avachis sur leur canapé, avant le transfert en urgence vers la maison de retraite ! Dans la même chambre j’espère, ah ah….
— Charlotte !! Tu es avec moi ?
— Oui mon chéri….
— J’ai peut-être été un peu direct, on peut commencer par une promenade au clair de lune, même s’il pleut un peu, c’est plus romantique, avant de…
— Noooon ! Rien à battre de la pleine lune… heu, pardon, on verra après, pour la lune.
Je siffle ma coupe comme un pilier de bar. Depuis le temps qu’on bourlingue ensemble, je peux envoyer valser ma pudeur de gazelle. Je me détends et je vais droit au but sans plus de chichis.
Je m’agenouille devant lui, m’activant sur sa ceinture de cuir. Elle me résiste, il m’aide en soupirant un peu, de lassitude ou de désir, comment savoir, mais enfin il ne parle plus, je peux m’envoler, me plonger dans un univers de fantasmes et de sensualité empli de sexes en érection croisant le fer autour de moi… Je dégage son sexe ; parfait ! Son parfum, sa taille, j’en raffole ! Je le déguste sur toute sa longueur comme une glace au café qui durerait à l’infini, de plus en plus chaude et raide dans ma bouche. J’adore le sentir bouger, palpiter, enfler, durcir, émettre quelques délicieuses gouttes avant le cocktail final… Il s’extrait brusquement, me relève, et m’emporte dans ses bras. Je roucoule de me retrouver prisonnière, à sa merci, oui, qu’il me possède maintenant, fort, à la hussarde, me fasse payer mon indifférence, mes piques… mais il a d’autres projets apparemment, et je ne sais pas si je vais le supporter, tant je veux qu’il me prenne, je n’ai pas de patience.
— Prends moi !
— Non
Il a adopté son ton calme, celui sans réplique. Il descend entre mes jambes m’offrir cette caresse insupportable de douceur, je l’adore, mais c’est si difficile pour moi de m’abandonner, je ne tiens pas en place. Je me rends, je vais tâcher de ne plus me dérober et de rester immobile. Il me lèche tant et tant, je me sens confuse, même si je sais qu’il adore ça, et après tout j’adore le lécher moi aussi – d’ailleurs, je recommencerais bien. C’est égal, je ne peux m’empêcher d’être gênée, maudite soit mon éducation judéo-chrétienne ! Je sens qu’il est prêt à rester des heures, là, dans ma moiteur, enserré entre mes cuisses nerveuses qui menacent de l’étrangler, et je finis par me détendre, la tempête de mes pensées s’apaise, il n’y a plus que des sensations… Soudain mon orgasme monte, enfle, et explose dans sa bouche, un orgasme libérateur, j’en crie de plaisir pendant des secondes d’éternité ! Me voilà tout apaisée, heureuse comme jamais, amoureuse comme au premier jour. Et dévorée de désir. Cette fois, il daigne enfin me prendre, ce soulagement !
Il me fait l’amour puissamment en me regardant droit dans les yeux, et soudain, il se lance dans un discours sans débander, sans doute excité par ce qu’il veut me dire… C’est bien la première fois qu’il bavarde pendant l’amour ! Je pensais que cela briserait notre transe érotique, ce corps à corps sensuel dans lequel je ne pense plus, enfin, livrée à mes sensations, mais je connais le pouvoir des fantasmes… Je pourrais d’ailleurs lui confier les miens au fur et à mesure qu’ils me viennent, des images spontanées, diablement excitantes qui me donnent l’impression de passer des vitesses (quelle métaphore foireuse). Oui, ça pourrait l’exciter encore plus ! Des images d’une crudité affolante surgissent et me tendent de plaisir dès que je fais l’amour, je devrais les noter, il y aurait de quoi écrire des scénarios de films X, peuplés d’inconnus, sexes dressés vers le ciel ! Bon, je vais déjà écouter les siens…
— Excuse-moi, tu disais ?
Entre deux assauts, il s’explique enfin. Je n’en reviens pas ! Il est devenu fou…
à suivre…


